Il était une fois un monsieur qui sappelait Monsieur de Marconfare. Bien quil fût « Monsieur », il navait pourtant pour toute richesse quune pauvre chaumière et deux poules. Pour toute nourriture, il se contentait des ufs que pondaient les deux poules et allait, vêtu dune guenille. Un jour, passant par-là, maître Renard vit les poules et les mangea. Il avait à peine fait quelques pas quil entendit des gémissements. Se retournant, il aperçut monsieur de Marconfare qui se lamentait : Je vais mourir de faim, disait-il, maintenant que je nai plus mes poules Je vais mourir de faim Contrarié, maître Renard sen fut et marcha longtemps ; enfin, il se trouva devant le château du roi. Sans sarrêter, il entra et alla droit au roi. Sire, je connais un monsieur qui voudrait bien vous voir ; il sappelle Monsieur de Marconfare. A cela, le roi répondit : Va lui dire de venir. Je veux le voir aussi. Maître Renard revint trouver Monsieur de Marconfare pour lui dire que le roi lattendait en son château. Ah ! Misérable, dit Monsieur de Marconfare, tu te moques de moi. Jamais je noserais maventurer dans cet état. Que dirait le roi en me voyant ainsi ? Il ma dit que cela ne faisait rien. Ils partirent et marchèrent longtemps. Bientôt, le château fut en vue. Alors dune bousculade, maître Renard envoya Monsieur de Marconfare dans une haie de ronces, doù il se releva encore plus déchiré. Pourquoi mas-tu envoyé dans ces ronces ? Dit-il en sasseyant sur le bord de la route et en se lamentant de plus belle. Il ne voulut pas aller plus loin. Maître Renard partit alors tout seul au château du roi. Sans sarrêter, il entra et alla droit au roi. Sire, je vous amenais Monsieur de Marconfare mais, à peu de chemin dici, notre cheval qui nest pas très bien dressé il est vrai, nous a jetés dans un ravin. Comme en bas il y avait une haie de ronces, monsieur de Marconfare sest déchiré. A présent, il ne veut plus venir jusquà vous parce quil nest plus présentable. Le roi donna des ordres pour quon amenât les habits les plus beaux. Tiens, tu lui donneras cela pour se vêtir. En partant, passe par lécurie, dis que lon prenne les plus beaux chevaux et fais les atteler à mon plus riche carrosse. Maître Renard fit comme le roi lui avait dit et il arriva devant Monsieur de Marconfare qui se lamentait, assis sur le bord de la route en se tenant la tête entre les mains. En rien de temps, il fut habillé comme le roi lui-même. Ils montèrent dans le carrosse et firent une entrée remarquée dans la ville et au château. Vive Monsieur de Marconfare Vive Monsieur de Marconfare criait le peuple. Le roi, impressionné, reçut fort bien Monsieur de Marconfare et linvita à déjeuner. Pendant le repas, maître Renard resta à la porte. Le repas fini, il entra dans la salle à manger en criant: Au secours ! Nous sommes tous perdus. Des troupes ennemies arrivent sur la ville et le château. Elles pillent et brûlent tout sur leur passage. Que faire ? Demanda le roi affolé. A votre place, continua maître Renard, je me cacherais dans ce tas de gerbes déposé dans la cour du château, et je nirais pas seul, je prendrais les miens avec moi Tu as une bonne idée Il sadressa à Monsieur de Marconfare : Vous venez Monsieur de Marconfare ? Ce nest pas la peine, dit le renard, il restera avec moi. Nous allons nous cacher ailleurs Mais dépêchez-vous, nentendez-vous pas vos ennemis qui crient : « A mort le roi et toute sa famille. » Faites vite. Lorsque toute la famille royale fut cachée, maître Renard alla chercher du feu et alluma le tas de gerbes. Voyant la fumée et les flammes, tout le peuple accourut et maître Renard leur dit : Regardez dans ce tas de gerbes il y a plus de cinq cents rats et certains sont plus gros que moi Jy ai mis le feu Regardez les ruades quils donnent. Et tout le peuple riait de bon cur. Quand il ne resta plus que des cendres, maître Renard dit au peuple : Votre roi et les siens se sont enfuis. Voulez-vous Monsieur de Marconfare pour roi ? Oui oui cria le peuple. Voilà comment Monsieur de Marconfare devint roi et comment maître Renard put manger chaque jour autant de poules quil lui prenait fantaisie de vouloir sans que personne ne lui reproche rien.
Description(s) 0